France
Artillerie de la Garde Impériale


Carte de Visite, Atelier Maujean à Paris
Ludovic de Noüe, Capitaine au Régiment à Cheval de l'Artillerie de la Garde Impériale, vers 1860.


Ludovic-Marie-François de Noüe est né à Paris le 18 Avril 1829.
Il est le fils aîné de Valérien-Louis-Charles de Noüe, comte de Noüe, lieutenant d'artillerie et maître des requêtes au conseil d'Etat, et d'Anne-Louise-Camille-Blanche de Bonllenois.
Ludovic de Noüe fera de brillantes études : Polytechnicien, il rejoint une des "armes savantes", l'Artillerie dans laquelle il fera carrière.
On le retrouve Lieutenant en date du 1er Octobre 1853.

En 1854 il est Lieutenant en Second à la 8e Batterie (Capitaine Claret) du 17e Régiment d'Artillerie à Cheval à Vincennes.
A cette époque seule la 1ère Batterie du régiment est attachée à la réserve d'artillerie de l'Armée d'Orient et il ne semble pas que notre jeune officier ait participé à la Guerre de Crimée.

Dès 1856, on le retrouve affecté à Versailles au brillant Régiment d'Artillerie à Cheval de la Garde Impériale.
Il y est Lieutenant en Premier à la 1ère Batterie (Capitaine Bonnin).

Il est promu Capitaine en Second le 30 décembre 1857 et, comme le veut le règlement, quitte la Garde pour rejoindre le 10e Régiment Monté (Toulouse), où il est affecté à la 13e Batterie (Capitaine Lamandé).

Il participe à la Campagne d'Italie comme Capitaine en Second au 5e Régiment d'Artillerie.
Il est fait Chevalier de la Légion d'Honneur par Décret impérial No.9014 du 13 Août 1859, qui "nomme dans l'ordre impérial de la Légion d'honneur les militaires de l'armée d'Italie dont les noms suivent", et précise :
"4e Corps.
(...) M. de Noue (Ludovic-François-Marie), capitaine en second au cinquième régiment d'artillerie ; douze ans de service effectif, cinq campagnes."

1860 verra son retour dans le Régiment à Cheval de la Garde, comme Capitaine en Second de la 5e Batterie (Capitaine de Contamine).

C'est l'époque où il se fait photographier par Maujean :  il porte en effet sur ce cliché cordons fourragère et cordon de talpack, accessoires élégants mais onéreux et peu pratiques, qui seront supprimés cette année là.

Gageons néanmoins que ce brillant unifome l'aura aidé à séduire la ravissante Marie-Elisabeth Harney, 22 ans et seconde fille du Général Américain William Selby Harney.

Marie-Elisabeth suivait les pas de sa sœur aînée Ann-Biddle, qui avait épousé un Officier de Marine Français, le Vicomte Louis de Thury : à l'annonce des fiancailles de sa fille aînée, à l'automne 1854, le Général obtint un congé de six mois et se rendit en France où il avait l'intention "to whip the Frenchman, who dared think of marrying his daughter" ("de fouetter le Français qui osait penser épouser sa fille"). Le mariage aura lieu avant son débarquement (in "General William S. Harney, Prince of Dragoons" de George Rollie Adams).
Ludovic de Noüe épousera donc la fille de l'irrascible Général le 22 Janvier 1861 à Paris. Cette union aura un rôle important dans sa carrière. Il leur naîtra bientôt une première fille, Blanche-Marie-Henriette-Louise-Elisabeth, née à Paris le 26 Novembre 1861.

En 1862, de Noüe est affecté au 2e Régiment d'Artillerie à Pied, Capitaine en Second à la 1ere Batterie (Capitaine Portes), à Vincennes. Nous remarquerons qu'il sait y faire pour les affectations de choix autour de Paris !

L'année suivante, c'est la naissance de son premier enfant, Marie-Guillaume-Anne-Louis, né à Paris le 6 Avril 1863 (et futur officier d'Artillerie), et alors que de Noüe est au Mexique, où il est parti comme Capitaine en Premier d'Artillerie, Aide de Camp du Général Vernhet de Laumière, commandant l'Artillerie du Corps expéditionnaire, et son ancien Colonel Commandant à la Garde.


L'Aventure Mexicaine.
On remarquera que, caprice du destin, le petit Guillaume naissait le jour même où succombait le Général de Laumière :
"(...) Le colonel de Laumière prit part à la guerre d'Italie en qualité de commandant de la réserve générale de l'artillerie, et fut fait officier de la Légion d'honneur, à Milan, le 15 juillet 1859. Nommé colonel du régiment d'artillerie à cheval de la garde impériale, il occupait cette position depuis trois ans lorsqu'il fut appelé à prendre le commandement de l'artillerie du corps expéditionnaire du Mexique, commandement dans lequel il fut maintenu malgré sa promotion au grade de général de brigade, qui eut lieu le 12 août 1862, quelques jours avant son départ de France.
C'est à l'assaut de Puebla, le 29 mars 1863, au moment où, placé dans la quatrième parallèle, à soixante mètres de la brèche, il observait les progrès de nos soldats, que le général de Laumière a été frappé d'une balle à la tête. Sa première parole, en revenant à lui, fut pour ordonner d'approvisionner l'infanterie de nouvelles cartouches. Explorée par les hommes de l'art, sa blessure ne fut pas d'abord considérée comme mortelle, et les premières dépêches reçues à Paris exprimaient des espérances de guérison qui ne se sont malheureusement pas réalisées. Le délire s'empara de lui dans la journée du 5 avril,et il succomba la nuit suivante. (...)"
(in "Histoire de la guerre du Mexique", de Félix Ribeyre, Eugène Pick de l'Isère Editeur, Paris, 1863).

On imagine la lourde charge de l'Aide-de-Camp dont le Général vient à décéder en plein siège. On peut penser qu'il s'en sera tiré honorablement, puisque de Noüe sera fait Officier de la Légion d'Honneur en date du 12 Avril 1863.
Les troupes Françaises ne rentreront dans Puebla que le 19 Mai suivant. 
La prise de Puebla ouvrait au corps expéditionnaire les portes de Mexico où il entrera le 10 Juin 1863.
On remarquera que de Noüe suit ici les traces de son beau-père, qui avait participé à la prise de Mexico par les troupes Américaines le 13 Septembre 1847.

De Noüe sera maintenant attaché au vainqueur de Puebla, le Général Bazaine dont il sera Officier d'Ordonnance.
On retrouve cet attachement à la naissance du second fils de Ludovic de Noüe, prénommé Joseph-Valérien-Louis-Paul-Etienne-Guadeloupe-Achille, et né à Mexico le 5 Septembre 1865.

C'est que la femme de Ludovic de Noüe a rejoint son époux sur son continent natal :
"Beaucoup de jeunes et jolies femmes avaient rejoint leurs maris au Mexique. Parmi elles (...) Mme de Noue et Mme Magnan voyageaient à travers le pays dans une voiture du train attelée de quatre mules et composée, comme celles des forains, de deux pièces, chambre à coucher et cabinet de toilette, séparées par un simple rideau et prenant jour par des fenêtres vitrées. Ces dames avaient soin de faire coïncider leurs déplacements avec un départ de troupes, car les chemins étaient moins sûrs que jamais".
(in "La société du second empire" de Maurice Fleury et Louis Sonolet).

Quant aux diverses occupations de l'Aide-de Camp de Bazaine, on peut en avoir une illustration au travers de différents documents qui nous sont parvenus :

20 Mars 1864. 
Ministre Plénipotentiaire et Envoyé Extraordinaire des Etats Unis:
En réponse à la demande que vous m'avez adressée, d'un sauf-conduit pour le Licencié Dn. Juan Jose Baz, j'ai l'honneur de vous informer que j'ai été avisé qu'un passeport avait été délivré, le 14 du courant, par le Gal. Marquez, à Morelia, pour permettre à Mr. Baz de se rendre à Mexico. 
Vous voudrez bien faire informer Mr. Baz, à son arrivée à Mexico, pour qu'il ait à se présenter à mon cabinet, où Mr. le Capitaine de Noue lui délivrera un permis de séjour d'un mois dans la Capitale. 
(Bazaine.)

Le 28 mai 1864, Maximilien débarquait à Vera-Cruz - il ferait une entrée officielle et triomphale à Mexico le 12 Juin.

18 Septembre 1864.
De Noüe assiste au départ du Capitaine de Raincy de Mexico pour la France ; son épouse, la Comtesse de Raincy, relate dans ses souvenirs (in "Carnets de la Sabretache", 1936, p.401-402) :
"Nos voitures, nos bagages étaient partis la veille avec l'escorte, les domestiques et les chevaux, pour aller nous attendre à Ayotla où nous devions les retrouver. C'est donc en voiture et au trot de nos quatre mules que nous nous mîmes en route. A la Garrita de San Lazaro, aux portes de Mexico, le général Bazaine et ses aides de camp nous attendaient pour nous faire leurs adieux. Le général nous demanda si nous avions bien nos provisions de route. Le mot "provisions" réveille tout à coup un souvenir. On cherche, et ô douleur ! nous avions oublié à l'hôtel le meilleur de notre sang, sous la forme d'un panier, contenant une dinde, un fromage, des fruits, que sais-je encore ! bref de quoi vivre pendant deux jours. Tous ces Messieurs s'offrirent pour aller chercher le précieux panier, mais mon mari était seul capable de le retrouver dans l'hôtel où peut-être était-il déjà volé. Le voilà donc enfourchant un cheval de l'escorte et parti à fond de train à la conquête d'une dinde. Un quart d'heure après il revenait sur un cheval tout blanc d'écume, lui, couvert de poussière, mais, ô joie, le panier dans les bras !
Et ce furent alors les adieux, les vœux de bon voyage ; on se jeta dans les bras les uns des autres. Je n'ai jamais embrassé tant de visages masculin en un seul jour : le général, Magnan, Blanchot, Miribel, de Nouë, et d'autres encore ; j'embrassai tout, si contente de partir que j'en devenais folle de joie."

9 Octobre 1864.
"Corps du Mexique
Cabinet du maréchal commandant en chef.
Ce 9 octobre.
Mon cher Loysel, 
Jusqu'au 1er août dernier, le chiffre des exemplaires de l'Estafette envoyés au quartier-général a été de 7, nombre qui est indispensable pour satisfaire aux exigences suivantes : 

Le maréchal ............................................................................
Le cabinet de service ............................................................
Le cabinet, pour envoyer des coupures en France ..........
Le général de division ..........................................................
La marine. — Veracruz et Mazatlan ....................................
Total ........................................................................................

1


2
8

Vous voyez qu'il faut même du mérite pour satisfaire huit personnes avec 7 exemplaires.
J'ai fait réclamer à Barres, qui a dit que le nombre a envoyer devait être 5 et non pas 7, comme par le passé.
Auriez-vous In complaisance de régler cette petite affaire. » 
Tout à vous, 
L. DE NOUE."

(in "Documents officiels recueillis dans la Secrétairie privée de Maximilien", par E. Lefêvre, Rédacteur en chef de la Tribune de Mexico. Tome Second, 1869)

Quelques lettres du Général de Maindreville (alors Capitaine et aide-de-camp du Général de Maussion), qui fréquente les de Noüe, nous renseignent également précieusement sur ces années Mexicaines :

"Vera-Cruz, 6 février 1865.
(...) Mme de Noüe est à Mexico ; son mari l'a à peine vue car le maréchal Bazaine l'a emmené (le mari) au siège d'Oajaca. Je ne sais pas encore si toute cette affaire durera longtemps, mais le Maréchal y étant, il est certain que ce sera bientôt fait. (...)"
(in "Carnets de la Sabretache", 1935, p.322)

"Mexico, 25 février 1865.
(...) Nous avons retrouvé ici Mmes de Noüe et de Courcy. ces deux dames habitent ensemble. Ludovic de Noüe est allé à Oajaca, mais revient aujourd'hui. (...)
(ibid., p.324).

"Mexico, 9 mars 1865.
(...) Mme de Courcy et Mme de Noüe ont eu dimanche un petit accident. les deux ménages avaient projeté une petite excursion de trois jours dans les montagnes qui entourent le Popocatepetl. Ils avaient loué une diligence, commandé une escorte (c'est toujours plus sûr aux environs de la ville) et sont partis dimanche. Malheureusement à quelques lieues d'ici, leur voiture a versé dans les mauvais chemins. Ces dames n'ont rien eu, mais un soldat qui était sur la voiture a été blessé et le cocher a eu l'épaule démise. Cela a tristement interrompu le voyage. (...)"

(ibid., p.325).

De Noüe sera promu Chef d'Escadron le 20 Mars 1865. Il quitte donc nominalement l'emploi d'Aide-de-Camp mais conserve les mêmes fonctions, étant maintenant, selon l'Annuaire, "à la disposition du général commandant l'artillerie du corps expéditionnaire du Mexique".

"Mexico, 28 juin 1865.
(...) Lundi, le Maréchal a épousé sa novia, Mlle Pena. Tout s'est passé à la Cour et s'est, dit-on, fort bien passé. C'est l'archevèque de Mexico, Mgr La Bastide, qui les a mariés. Il y a eu ensuite un splendide déjeuner et ç'a été tout. Mme de Noüe va très bien ; elle n'a pas la bosse de l'exactitutde et le jour du mariage du maréchal, elle est arrivée au palais près d'un quart d'heure en retard. L'Impératrice lui a lancé, paraît-il, un regard foudroyant. On m'a dit depuis que ce retard provenait de Mme Blanchot, la femme d'un autre aide-de-camp du Maréchal, auquel cas je devrais réparation au ménage de Noüe. "
(ibid., p.330).


"Mexico, 27 août 1865.
(...) On n'entend parler que de vols depuis un mois. Ainsi, jeudi dernier, j'étais allé dîner chez Mme de Noüe, les hommes étaient allés fumer après dîner. Les dames se tenaient dans le salon : le petit salon voisin était sans lumière et la fenêtre était ouverte. D'adroits voleurs ont jeté à travers les barreaux un gros hameçon et ont littéralement harponné un assez beau tapis qui couvrait un table. Quand on est rentré dans la pièce, il n'y avait plus rien, les journaux et les livres étaient tombés et avaient seuls échappé à ces messieurs. L'hameçon dont les voleurs se servent est une petite boule de plomb armée de quatre crochets : de quelque côté que la boule tombe, il y a toujours un de ces crochets qui croche et on n'a qu'à ramener tout doucement l'objet saisi. (...)" 
(ibid., p.332).

6 octobre 1865.
(à propos du décret du 3 octobre 1865 "contre les guérilleros et les malfaiteurs")
"Trois jours après la promulgation de la loi, le 6, M. Bazaine trouvant qu'on ne lui envoyait pas assez vite les exemplaires imprimés dont il avait besoin, les fit demander par M. de Noue, et pour qu'il n'y eut point d'erreur possible sur la loi dont il s'agissait, celui-ci eut soin d'ajouter au bas de sa lettre : « Je parle de la dernière loi de rigueur signée par le cabinet tout entier. » 
L'archiduc ordonna le 8 qu'on en tirerait de nouvelles copies et qu'on en remettrait au maréchal autant d'exemplaires qu'il en désirerait."
(in "Documents officiels recueillis dans la Secrétairie privée de Maximilien", par E. Lefêvre, Rédacteur en chef de la Tribune de Mexico. Tome Second, 1869)


Liaisons dangereuses.
Au-delà de ces questions administratives, Ludovic de Noüe sera impliqué dans les tractations entre les Français, l'Empereur Maximilien et les Conférérés qui viennent lui proposer leurs services, après la reddition du General Lee à Appomattox en Avril 1865.
On se rappelle en effet que Me de Noüe est originaire du Missouri et fille de Général (qui lui-même ne prendra pas parti dans la Guerre de Sécession).

C'est ainsi W. Terrel qui approche de Noüe pour lui proposer une alliance contre l'Armée de l'Union :
"Furnish me with six months' pay and permit me to go to the Capitol of Texas [where no oath will be required of me]. Through the Governor of that State I can obtain accurate information of the plans and purposes of the yankee Government at all times, and can obtain the earliest information of every secret filibusterous enterprise intended for Mexico.
...Should war begin between France and the United States I would be on the ground, and would fall on the right flank of the yankee force on the Rio Grande in 30 days with from 2 to 4000 cavalry and open communication with your forces at Piedras Niegras or Monterrey."
 
(Cité par J. Fred Rippy, "Mexican Projects of the Confederates", Volume 22, Number 4, Southwestern Historical Quarterly Online :
http://www.tsha.utexas.edu/publications/journals/shq/online/v022/n4/contrib_DIVL3502_print.html)

En Juin 1865, c'est le Général Shelby qui sera passé au Mexique avec 1000 cavaliers bien armés. Il se rendra à Mexico pour rencontrer Maximilien et lui offrir ses services (in "Shelby's Expedition to Mexico" de John N. Edwards, 1889):
"WHEN Shelby arrived in Mexico, Maximilian had been reigning over a year. The French held all the country that was worth holding—certainly all the cities, the large towns, the mining districts, and the seaports. Besides the French troops, the Emperor had in his service a corps of Imperial Mexicans, and a small body of Austrian and Belgian auxiliaries. The first was capable of infinite augmentation but they were uncertain, unreliable, and apt at any time to desert in a body to the Liberals. The last were slowly wasting away— being worn out as it were by sickness and severe attrition. 
The treasury was empty. Brigandage, a plant of indigenous growth, still flourished and grew luxuriantly outside every garrisoned town or city. The French could not root it up, although the French shot everything upon which they got their hands that looked a little wild or startled. No matter for a trial. The order of an officer was as good as a decree from Bazaine. Thousands were thus offered up as a propitiation to the god of good order—many of them innocent—all of them shot without a hearing. 
This displeased the Emperor greatly. His heart was really with his Mexicans, and he sorrowed over a fusilade for a whole week through. At times he remonstrated vigorously with Bazaine, but the imperturbable marshal listened patiently and signed the death warrants as fast as they were presented. These futile discussions at last ended in an estrangement, and while Maximilian was emperor in name, Bazaine was emperor in reality. 
With a soldier's quickness and power of analysis, Shelby saw and understood all these things and treasured them up against the day of interview. This was speedily arranged by Commodore Maury and General Magruder. Maximilian met him without ceremony, and with great sincerity and frankness. Marshal Bazaine was present. Count de Noue, the son-in-law of General Harney, and chief of Bazaine's civil staff, was the interpreter. 
The Emperor, while understanding English, yet preferred to converse in French and to hold all his intercourse with the Americans in that language. 
Shelby laid his plans before him at once. These were to take immediate service in his Empire, recruit a corps of forty thousand Americans, supersede as far as possible the native troops in his army, consolidate the Government against the time of the withdrawal of the French soldiers, encourage immigration in every possible manner, develop the resources of the country, and hold it, until the people became reconciled to the change, with a strong and well organized army. Every proposition was faithfully rendered to the Emperor, who merely bowed and inclined his head forward as if he would hear more. Shelby continued, in his straightforward, soldierly manner: "It is only a question of time, Your Majesty, before the French soldiers are withdrawn." Marshal Bazaine smiled a little sarcastically, it seemed, but said nothing. 
" Why do you think so?" inquired the Emperor. "Because the war between the States is at an end, and Mr. Seward will insist on the rigorous enforcement of the Monroe Doctrine. France does not desire a conflict with the United States. It would neither be popular nor profitable. I left behind me a million men in arms, not one of whom has yet been discharged from the service. The nation is sore over this occupation, and the presence of the French is a perpetual menace. I hope your Majesty will pardon me, but in order to speak the truth it is necessary to speak plainly." 
"Go on," said the Emperor, greatly interested. 
"The matter whereof I have spoken to you is perfectly feasible. I have authority for saying that the American Government would not be averse to the enlistment of as many soldiers in your army as might wish to take service, and the number need only be limited by the exigencies of the Empire. Thrown upon your own resources, you would find no difficulty, I think, in establishing the most friendly relations with the United States. In order to put yourself in a position to do this, and in order to sustain yourself sufficiently long to consolidate your occupation of Mexico and make your Government a strong one, I think it absolutely necessary that you should have a corps of foreign soldiers devoted to you personally, and reliable in any emergency." On being appealed to, Commodore Maury and General Magruder sustained his view of the case, and Shelby continued: "I have under my command at present about 1,000 tried and experienced troops. All of them have seen much severe and actual service, and all of them are anxious to enlist in support of the Empire. With your permission, and authorized in your name to increase my forces, in a few months all the promises given here to-day could be made good." 
The Emperor still remained silent. It appeared as if Shelby was an enigma he was trying to make out—one which interested him at the same time that it puzzled him. In the habit of having full and free conversations with Commodore Maury, and of reposing in him the most unlimited confidence, he would look first at Shelby, and then at Maury, as if appealing from the blunt frankness of the one to the polished sincerity and known sound judgment of the other. Perhaps Marshal Bazaine knew better than any man at the interview how keen had been Shelby's analysis of the situation; and how absolutely certain were events, neither he nor his master could control, to push the last of his soldiers beyond the ocean. At intervals the calm, immobile face would flush a little and once or twice he folded and unfolded a printed dispatch he held in his hands. Beyond these evidences of attention, it was not known that Bazaine was even listening. His own judgment was strongly in favor of the employment of the Americans, and had the bargain been left to him, the bargain would have been made before the end of the interview. He was a soldier, and reasoned from a soldier's standpoint. Maximilian was a Christian ruler, and shrank within himself, all his nature in revolt, when the talk was of bloodshed and provinces held by the bayonet. His mind was convinced from the first that Shelby's policy was the best for him, and he leaned to it as to something he desired near him for support when the crisis came. He did not embrace it, however, and make it part and parcel of his heart and his affections. 
The Emperor did not reply directly to Shelby. He rose up, beckoned De Noue to one side, spoke to him quietly and earnestly for some brief moments, dismissed his visitors pleasantly and withdrew. His mind, however, it appears, had been made up from the first. He was not willing to trust the Americans in an organization so large and so complete—an organization composed of forty thousand skilled and veteran soldiers, commanded by officers of known valor, and anxious for any enterprise, no matter how daring or desperate. Besides he had other plans in view. 
As De Noue passed out he spoke to Shelby: "It's no use. The Emperor is firm on the point of diplomacy. He means to try negotiation and correspondence with the United States. He thinks Mr. Seward is favorably disposed toward him, and that the spirit of the dominant party will not be adverse to his experiment with the Mexicans. His sole desire is to give them a good government, lenient yet restraining laws, and to develop the country and educate the people. He believes that he can do this with native troops, and that it will be greatly to the interest of the American Government to recognize him, and to cultivate with him the most friendly relations. 
At any rate," and De Noue lowered his voice, "at any rate, His Majesty is an enthusiast, and you know that an enthusiast reasons ever from the heart instead of the head. He will not succeed. He does not understand the people over whom he rules, nor any of the dangers which beset him. You know he once governed in Lombardy and Venitia, when they were Austrian provinces, and he made so many friends there for a young prince that he might well suppose he had some divine right to reign successfully. There is no similarity, however, between the two positions. A powerful army was behind him when he was in Italy, and a singularly ferocious campaign, wherein the old Austrian, Marshal Radetsky, manifested all the fire and vigor of his youth, had crushed Italian resistance to the earth. It was the season for the physician and the peace-maker, and the Emperor came in with his salves and his healing ointments. Singularly fitted for the part he had been called upon to perform, he won the hearts of all with whom he came in contact, and left at last universally loved and regretted. It is of no use, I say again, General, the Emperor will not give you employment." "I knew it," replied Shelby. "How?" and De Noue shrugged his shoulders. "From his countenance. Not once could I bring the blood to his calm benignant face. He has faith, but no enthusiasm, and enthusiasm such as he needs would be but another name for audacity. I say to you in all frankness, Count De Noue, Maximilian will fail in his diplomacy." 
"Your reasons, General." 
"Because he will not have time to work the problem out. I have traveled slowly and in my own fashion from Predras Negras to the City of Mexico—traveled by easy stages when the need was, and by forced marches when the need was, fighting a little at times and resting a little at ease at times, but always on guard, and watching upon the right hand and upon the left. 
Save the ground held by your cantonments and your garrisons, and the ground your cannon can hold in range, and your cavalry can patrol and scour, you have not one foot in sympathy with you, with the Emperor, with the Empire, with anything that promises to be respectable in government or reliable in administration. Juarez lives as surely in the hearts of the people as the snow is eternal on the brow of Popocatapetl, and ere an answer could come from Seward to the Emperor's Minister of State, the Emperor will have no Minister of State. That's all, Count. I thank you very much for your kind offices to-day, and would have given a good account of my Americans if kingcraft had seen the wisdom of their employment. I must go back to my men now. They expect me early." 
Thus terminated an interview that had more of destiny in it, perhaps, than the seeming indifference and disinclination to talk on the part of the Emperor might indicate. The future settled the question of policy that alone kept the ruler and his subject apart. When the struggle came that Shelby had so plainly and bluntly depicted, Maximilian was in the midst of eight million of savages, without an army, with scarcely a guard, with none upon whom he could rely, abandoned, deserted, and betrayed. Was it any wonder, therefore, that the end of the Empire should be the dead wall at Queretaro?"


Vie mondaine à Mexico.
Lettre du Général de Maindreville (alors Capitaine et aide-de-camp du Général de Maussion)
"Mexico, 26 février 1866.
(...) Mme de Noüe va toujours bien ; nous avons fait, elle, le général (NOTA: de Maussion), sa femme, Ludovic et moi une assez jolie excursion la semaine dernière aux environs de Mexico. Nous avons été déjeuner sur l'herbe à la Canada, à cinq lieues d'ici. L'endroit est joli, au milieu des montagnes qui entourent comme une ceinture la vallée de Mexico. Ces deux dames ont fait fort bravement leurs dix lieues à cheval pour le moins : ce sont de véritables amazones. le déjeuner a été fort gai, bien qu'un peu gâté par un grand vent qui nous a assez ennuyés pendant la route. Les deux dames avaient voulu essayer du sombrero, et cette coiffure est loin d'être agréable par le vent. Elles ont dû remettre leurs casquettes, car on est ici sans cérémonie, et, le matin, les dames montent très bien à cheval en casquette et couvre-nuque, comme les militaires."
(in "Carnets de la Sabretache", 1935, p.424-425)

L'atmosphère est maintenant éminemment politique ; une lettre de Ludovic de Noüe nous en donne un aperçu :
"A M. le commandant Seigland, aide-de-camp de M. le général Douay. 
Corps du Mexique.—Cabinet du maréchal en chef. 
MEXICO, le 22 Avril 1866. 
Vous me dites que le général a été peiné que S. E. n'ait pas laissé leur libre cours aux basses calomnies par lesquelles on voulait l'attaquer. Il est bien certain que la réputation du général n'eût pas eu à en souffrir plus aux yeux de l'empereur Maximilien, qu'à ceux de M. le maréchal. 
Quant à vous dire quelle a été la source exacte de ces jolis renseignements, cela serait difficile, M. le maréchal, ayant considéré que c'eût été leur donner trop d'importance que de la rechercher. Nous les avons connus par l'intermédiaire de la direction de la police, aujourd'hui détruite, qui a cru de son devoir de nous les communiquer avant de les adresser au cabinet de l'empereur. 
Voilà, mon cher ami, ce que je suis chargé de vous dire. Maintenant je profiterai de ce que je traite de questions confidentielles pour vous dire, " de vous à moi," que je ne considère pas comme très discrets les petits jeunes gens que vous avez autour de vous. Ils sont tous charmants, même ceux qui ne portent pas l'épaulette, et je les aime tout plein; mais ils sont jeunes, et folle est la jeunesse! Donc, ils se figurent que leurs propres impressions doivent être celles de leur général, et ils écrivent en France des choses qui, si elles ne viennent pas d'eux-mêmes, sont parfaitement dénaturées. Je connais trop le caractère droit et loyal du général Douay pour lui attribuer les bavardages écrits du Mexique et colportés dans la capitale de France, d'où ils me reviennent à moi directement par le plus grand des hasards.
L. DE NOUE."

Mais la vie sociale continue 

"Mexico, 27 juillet 1866.
(...) Mme de Noüe habite maintenant Tacubaya, petite ville à deux lieues de Mexico. Tacubaya est à Mexico, comme Versailles est à Paris. Il y a deux chemins de fer pour aller de l'un à l'autre, seulement le chemin de la rive droite est traîné par des mules, il va naturellement moins vite que l'autre. Mais beaucoup de Mexicains préfèrent les mules : on est sûr d'arriver. Le chemin de fer à vapeur déraille au moins une fois par semaine. La locomotive traverse les rues de Tacubaya et il n'y a ni barrière ni palissade pour empêcher les gens de se promener sur la voie et même de se faire écraser. On raconte de temps à autre qu'il y a eu un Indien de coupé en deux, mais personne ne s'en inquiète.(...)"
(in "Carnets de la Sabretache", 1935, p.430-431)

"Mexico, 9 août 1866.
(...) Mexico est calme et je continue à y mener la même existence ; le cercle de mes relations s'augmente insensiblement et si cela continue, je finirai par connaître toute la ville. La société est très cosmopolite et on y parle toutes les langues possibles : je me suis remis un peu à l'anglais, mais je m'en tire fort mal. L'espagnol va mieux ; je me suis trouvé à table chez Mme de Noüe à côté d'une jeune Mexicaine qui est mariée depuis deux ans à un officier français, et qui ne sait pas encore un mot de français. Ce sera bien agréable pour elle quand son mari la ramènera de l'autre côté de l'eau. Heureusement je sais maintenant assez de castillan pour soutenir une conversation dans cette langue. (...)"
(ibid., p.431)


"Les voyageurs pour Mexico, en voiture !".
Un incident tragi-comique vient encore compliquer les relations entre les Français et Mexicains : la représentation, chez Mme de Noüe, à Saint-Cosme, d'une pochade écrite par le Marquis de Massa (Officier des Guides récemment arrivé au Mexique).
Si cette pièce fera les délices de la Société Française, elle sera très mal reçue par les Mexicains.

Le Capitaine de Maindreville en fait le récit dans une de ses lettres :
"Mexico, 27 septembre 1866.
On a joué la comédie samedi dernier dans le salon de Mme de Noüe. La pièce avait été écrite à Mexico par M. de Massa, officier aux Guides et auteur d'une pièce jouée, il y a un an, à Compiègne. M. et Mme la Maréchale ont assisté à la représentation qui a eu beaucoup de succès ; de Noüe jouait un rôle de jeune premier et s'est fort bien tiré de son rôle. Mme de Noüe devait jouer, mais aux dernières répétitions, elle a préféré s'abstenir et son rôle a été repris par un neveu du Maréchal qui est lieutenant de zouaves et qui a eu un certain succès. Il n'y avait qu'un petit nombre de Mexicains parmi les spectateurs : la pièce n'était pas à vrai dire pour leur être agréable... on se moquait beaucoup de leurs travers."
(ibid., p.432-433)

Jules Alfred Joachim Bochet dans son "Journal d'un officier de chasseurs à pied", nous en offre les bonnes feuilles :
"Mexico, 27 septembre 1866. 
(...)  Il y a à Mexico une véritable colonie d'officiers mariés et ayant leurs femmes avec eux. Le général Osmont et le général de Maussion, des françaises ; le maréchal, le capitaine Blanchot et les lieutenants Leclère et de Girardin, des mexicaines; le commandant de Noue, une américaine; le capitaine Magnan, une russe. On pourrait s'y amuser si on y restait. Nous en avons eu ces jours-ci un petit échantillon. M. le marquis de Massa a composé une petite pochade fort spirituelle intitulée : Les voyageurs pour Mexico, en voiture ! On l'a jouée chez Mme de Noue et je l'ai déjà vue trois fois. Cela a été parfaitement interprété, surtout par une des les belles-sœurs du capitaine Blanchot qui a obtenu le plus grand succès. Il y a, comme dans les revues, une série de fort jolis couplets. Je vais t'en citer deux des plus mordants. Tu sais que l'on vient de former des bataillons de Cazadorès de la légion et de l'armée mexicaine, avec le plus d'éléments français possible. Mais cela réussit assez mal, aussi chante-t-on   :
De tous les Corps qu'on vient d'établir
Les Cazadorès sont de tous les plus braves, 
Mais c'est égal : au moment de partir 
J'aimerais bien mieux m'engager.... 
dans les zouaves. 
M. F...., intendant français, a été pendant quelque temps ministre des finances et a fait décret sur décret pour tâcher de trouver de l'argent. Le dernier a été trouvé assez raide et viole ouvertement la chose jugée ; aussi n'a-t-il pas été appliqué  :
Que d'arrêtés a prodigué, déjà 
Le Ministre à propos des finances ! 
Arrêtez-le ! Sinon il finira 
Par arrêter un jour.... la diligence."
 

Sara Yorke Stevenson nous en propose d'autres morceaux de bravoure :
(in "Maximilian in Mexico: A Woman's Reminiscences of the French Intervention",  New York, The Century Company, 1899) :

"Oui, cette terre
Hospitalière
Un jour sera, c'est moi qui vous le dis, 
Pour tout le monde 
L'arche féconde 
Des gens de cœur et des colons hardis. 
Que faut-il donc pour cesser nos alarmes ? 
De bons soldats et de bons généraux, 
De bons préfets et surtout des gendarmes, 
Des financiers et des gardes ruraux. 

Refrain : 
Allons courage, 
Vite à l'ouvrage ; 
La France est là pour nous prêter secours. 
Vieux incrédules, 
Sots ridicules, 
De nos travaux n'entravez pas le cours."

On remarquera la cruelle et involontaire ironie de ce chant interprété en Septembre 1866 par la maison militaire du Maréchal Bazaine - alors qu'en France, tout se met en œuvre  pour une prochaine évacuation...
Si le corps expéditionnaire n'était pas encore au courant de ces intentions, pour les milieux bien informés au Palais de l'Empereur, alors au fait des tractations entre la France et les Etats-Unis -et de leur probable conclusion- c'est rien moins que la gifle ! 

Le couplet suivant allait lui déclencher l'ire de la jeune Maréchale Bazaine (la fameuse Pépita)  :
"Le roi Henri, qui détestait 1'impôt, 
Des Mexicains aurait bien fait 1'affaire, 
Au lieu de poule, un zopilote au pot: 
Voila 1'moyen de devenir populaire!"

Le zopilote, oiseau charognard, était en effet considéré comme particulièrement impur par les Mexicains... on ne fait pas plus maladroit !

D'autres couplets auront eux des cibles dans le corps expéditionnaire lui-même :
"A Mexico les cancans vont leur train, 
On vous condamne avant de vous entendre, 
C'est bien " petit" d'éreinter son prochain, 
Bon entendeur saura bien nous comprendre."

Sara Yorke Stevenson nous raconte que l'assistance, dans un éclat de rire, de se retourner vers le Colonel Petit, présent ce soir là.
Ce dernier faisant mine d'apprécier la plaisanterie de s'incliner.
Cette tirade aurait été un épisode de plus suite à une plaisanterie organisée par ses camarades officiers (dont le Marquis de Massa) aux dépens du Colonel : celui-ci devant être reçu par un Alcalde lors d'une cérémonie officielle, il fut glissé à cet édile que le Colonel Petit était le fils du Général (embrassé par Napoléon Ier comme symbolisant la Grande Armée au moment de son départ pour l'Ile d'Elbe).
Sans qu'on sache très bien si l'idée fut celle de l'Alcalde où si elle lui fut suggérée par les Français, le Colonel Petit se retrouva obligé de plus ou moins rejouer le rôle de son père face à l'Alcalde-Napoléon, dans une parodie du départ à l'Ile d'Elbe, et ce en pleine cérémonie officielle et en présence de ses soldats !
Le tout fit l'amusement général mais aigrit considérablement le Colonel Petit - qui le ruminait encore et l'aurait fait savoir. 

D'autres couplets se situent bien dans l'air du temps - et la montée de l'antagonisme avec la Prusse :
"L'aiguille est un outil
Dont je ne suis en peine
Tant que j'aurai la mienne
Au bout de mon fusil. 
Vous qui chantez victoire, 
Héros de Sadowa, 
Rappelez-vous 1'histoire 
D'Auerstadt et d'Iéna."

Les chroniqueurs rapportent que Maximilien, intrigué par le vif succès de cette "pochade", exprima le désir de la voir représentée en son Palais ; mais apprenant les critiques envers son gouvernement, ce projet tourna court et on arrêta de la jouer.

On comprend mieux au regard du caractère un peu trop "piquant" de ces vers, que Mme de Noüe, en bonne hôtesse attentive à la susceptibilité de ses invités, ait préféré s'abstenir de participer au récital ! 


Retour en France
Le retour  approche et les tractations avec les Etats-Unis se feront maintenant sans Bazaine :
"Cette dernière citation contient une allusion à l'entente avec les État-Unis, cette entente dont on parlait beaucoup à Mexico, et en vue de laquelle M. Dano entretenait depuis plusieurs mois une correspondance avec M. de Montholon.Mais, — et c'est ici le lieu de signaler quelle confusion régnait entre nos représentants au Mexique, — M. Dano n'avait pas jugé à propos d'en informer le Commandant en chef. Le hasard seul mit celui-ci au courant de la chose, ainsi qu'il l'écrivit à son ministre (29 décembre 1866) : 
... Il me semble opportun de faire ressortir aujourd'hui à Votre Excellence un fait que j'ignorais alors, qui m'est signalé par une lettre venue de Washington, et dont M. le Ministre de France à Mexico est convenu depuis. C'est par le chef d'escadron d'artillerie de Noüe, mon officier d'ordonnance, marié à une jeune femme de Saint-Louis (Missouri), auquel j'ai donné un congé, pour régler, au moment de notre départ, des affaires d'intérêt, et auquel j'avais recommandé de me renseigner sur l'état du pays, que j'ai appris ce qui suit... 
C'est-à-dire les susdites négociations."
(in "La vérité sur l'expédition du Mexique - D'après les documents inédits de Ernest Louet, Payeur en Chef du Corps Expéditionnaire", par Paul Gaulot, Éditions Olendorff, 1890).

Le départ prend des allures de débâcle - déjà !, comme le raconte Sara Yorke Stevenson (in "Maximilian in Mexico: A Woman's Reminiscences of the French Intervention",  New York, The Century Company, 1899) :
"Letters from members of the marshal's staff, received after we sailed from Vera Cruz, convey a graphic impression of the last days of the intervention. 
From one under date of February 28, 1867, I quote the following passage: Vera Cruz is overcrowded; many of the troops are on board their transports. The marshal is expected tomorrow. The Liberal army is already in Tacubaya, and bands are at Tacuba and all around the valley of Mexico ready to enter the capital. Every one thinks that the Emperor must leave very soon. Our orders are to hurry off our last detachments; perhaps we dread lest a cry for help should come from Mexico. Terrible confusion prevails here. Lodgings have given out, and officers sleep anywhere in the streets. Last night Vicomte de Noue slept on the staircase, having secured for his wife a room in which four beds were made for her, her three children, her two maids, her two dogs, and her three parrots! The price for such miserable accommodations is so exorbitant that everybody prefers going immediately on board. ..."

Le retour de la famille sera marqué par un drame : le décès, le 6 Avril 1867 (encore un 6 Avril !), "en mer", de leur petite Blanche-Marie-Henriette-Louise-Elisabeth.


Quelques années de paix.
Le Chef d'Escadron de Noüe est affecté au 12e Régiment (monté) d'Artillerie, à Besançon, puis à Grenoble (changement sûrement bienvenu après ces années Mexicaines !)
Le régiment est commandé par le
Colonel Joseph Faye, lui même ancien de l'Artillerie de la Garde.

D'Octobre 1867 à Février 1868, le régiment dépêche deux batteries en Italie - une partie sera engagée à Mentana.
De Noüe n'est toutefois pas de l'expédition : il a mieux à faire et le 9 Septembre 1868, il est le papa d'une petite Jeanne-Marie-Elisabeth, née à Neuilly.


1870 - Armée du Rhin.
A l'entrée en guerre contre la Prusse, les 5e,  6e et 9e Batteries du Régiment sont affectées à la 3e Division (Raoult) du 1er Corps d'Armée de l'armée du Rhin. L'artillerie de la Division est commandée par le Lieutenant-Colonel Théguillaume, et les Batteries  par le Chef d'Escadron de Noüe :
5e Batterie
Détachée à Gray
Capitaine Commandant Ferreux
Capitaine en 2e Julien, Lieut. Fournier, Debatisse
148 sous-officiers et canonniers, 118 chevaux
Canons de 4 rayé de campagne.
6e Batterie
Détachée à Gray
Capitaine Commandant Desruol
Capitaine en 2e Jarlot, Lieut. Moreau, Monnier
166 sous-officiers et canonniers, 118 chevaux
Canons de 4 rayé de campagne.
9e Batterie
Besançon
Capitaine Commandant Wohlfrom
Capitaine en 2e André, Lieut. Boussard, Ss-Lieut. Morel
166 sous-officiers et canonniers, 118 chevaux
Canons à balles (mitrailleuses).

Ces batteries furent dirigées les 27 et 28 Juillet sur Strasbourg, point de rassemblement du 1er Corps.

Début Août, le Maréchal de Mac-Mahon reçut l'ordre d'assurer les communication avec le 5e Corps.
La 3e Division partit en conséquence pour Haguenau le 3 août, d'où, à la nouvelle de la défaite à Wissembourg, elle fut dirigée sur lal ligne Froeschwiller-Reichshoffen où elle est établie le 5 au matin.

Les batteries commandées par de Noüe participeront à la bataille de Froeschwiller  du 6 Août - on sait la supériorité de l'Artillerie Prussienne lors du conflit, qui ne permet pas aux batteries Françaises de la contre-battre.
La 6e batterie à 6 hommes blessés et 9 chevaux tués.
Le Capitaine Wohlfrom et quelques canonniers de la 9e batterie sont également blessés.

Le 1er Corps se replie alors sur le Camp de Châlons - où les batteries de la 3e Division n'arrivent que le 19.
Les batteries y sont réapprovisionnées.
Le 1er Corps de l'"Armée de Châlons" passe sous le commandement du Général Ducros. L'Artillerie de la 3e Division sous celui du Lieutenant-Colonel Sûter (qui remplace, Théguillaume, malade).

L'armée de Châlons repart sur l'Est - passe la Meuse le 30 Août (où la 1re section de la 6e Batterie, Lieutenant Moreau, marche avec l'avant-garde), puis se dirige sur Carignan.
Les batteries de la 3e Division sont établies sur les hauteurs de la rive gauche de la Meuse, pour protéger le passage de la rivière qu'elles franchissent elles-mêmes le soir, se dirigeant sur Douzy.
En y arrivant, elle apprennent l'ordre de repli sur Sedan - qu'elles atteignent vers 4 heures du matin.

L'artillerie de la 3e Division sera dirigée sur Floing, puis sur Saint-Menges, où elle s'établit, complètement isolée de sa division.

Le 1er Septembre, c'est la bataille de Sedan (in "Historique du 12e Régiment d'artillerie 1834-1890") :
"L'artillerie de la 3e division était, comme nous l'avons dit, cantonnée dans le village de Saint-Menges, complètement isolée de son corps d'armée, moins le 1re section de la 6e batterie, qui se trouvait d'avant-garde et qui était restée avec sa division.
Le 1er septembre au matin, pendant que l'on faisait prendre des renseignements sur la position du 1er corps, la cavalerie prussienne se rendit maîtresse des premières maisons du village et coupa aux batteries leur ligne de retraite sur Mézières.
Celles-ci, étant dans l'impossibilité de se déployer pour se défendre par leur feu, les servants furent réunis en avant du parc, chargèrent leurs armes et se tinrent prêts à recevoir l'ennemi. Mais celui-ci ne poussa pas jusqu'à la parie supérieure du village. les batteries se retirèrent alors par la seule issue laissée libre et gagnèrent la Belgique à travers bois ; elles purent néanmoins rentrer en France, passèrent la Meuse à Mouzon et arrivèrent vers 5 heures du soir à Mézières.
A Mézières, les batteries reçurent d'abord l'ordre de concourir à la défense de la place et se mirent immédiatement à l'œuvre ; mais, le 2, on les informa qu'elles devaient partir ; que les 5e et 6e batteries ne devaient emmener que leurs pièces et 3 servants par voiture et que les autres seraient conservés à Mézières pour sa défense.
Les batteries quittèrent Mézières le 3 et furent dirigées par Hirson, Avesnes et Landrecies, sur Paris. Les 5e et 6e batteries y arrivèrent le 6 septembre ; la 9e batterie n'y arriva que le 9 et y trouva son matériel et ses servants qui y avaient été dirigés le 5 par les voies ferrées.
A Paris, on les envoya camper au polygone de Vincennes, où elles séjournèrent jusqu'au 10 septembre, et le 11, elles furent mises en route, par les voies ferrées, sur Lyon, où se trouvait déjà le dépôt."

Effectivement, le Capitaine de Maindeville nous rapporte dans ses lettres (in "Carnets de la Sabretache", 1935, p.504 et 505) :
"Paris, 8 septembre 1870.
J'ai rencontré à ma grande satisfaction le commandant de Noue ; il a assisté à la bataille de Sedan, et a eu la chance d'abord d'en revenir et ensuite de ne pas être compris dans la capitulation Wimpfen. Il est arrivé à Paris, il y a quelques jours, et s'est empressé de faire partir sa femme et ses enfants pour Ostende."

"Paris, 12 septembre 1872.
(...) Ludovic de Noue s'attendait à être envoyé à Lyon. Le général Lespivent a fort à faire dans cette ville. La commune de Lyon ne veut pas reconnaître le préfet que le gouvernement lui a envoyé de Paris."
 


1870 - Armée de la Loire.
De Noüe rejoindra vite l'Armée de la Loire - quand le 16e Corps s'organise, à Blois et à Bourges, dans la première quinzaine d'Octobre 1870, sous le commandement du Général Pourcet, de Noüe commande en effet l'artillerie de la 2e Division d'Infanterie -  est composée de la 19e batterie du 9e régiment, et des 5e et 6e batteries du 12e régiment (in "Historique du 12e Régiment d'artillerie 1834-1890") :
"Les 5e et 6e batteries furent désignées pour faire partie de l'artillerie de la 2e division (général Barry), artillerie commandée par le chef d'escadron de Noüe. 
Ces deux batteries rentrées de l'armée du Rhin, avaient été réorganisées au camp de Sathonay. Elles quittèrent ce camp le 8 octobre et arrivèrent le 10 à Tours. La 5e batterie, avec un effectif de 122 hommes et 92 chevaux, était placée sous les ordres de : 
MM. Ferreux, capitaine commandant; 
Julien, capitaine en 2e; 
Viala, lieutenant en 2e ; 
Martin, sous-lieutenant. 

La 6e batterie, commandée par :
MM. Desruol, capitaine commandant; 
Fournier, capitaine en 2e ; 
Lachaume, sous-lieutenant; 
Brettenet, sous-lieutenant, 
avait un effectif de 167 hommes et 112 chevaux. 

Toutes deux attelaient du matériel de 4 rayé de campagne. 
Le 17 octobre, le général Pourcet, qui commandait la 1ere division du 16e corps, fut appelé à la tête de ce corps d'armée, et le 16e corps constitua, avec le 15e l'armée de la Loire,sous les ordres du général d'Aurelle de Paladines.
Le 19 octobre, les 5e et 6e batteries partirent pour Blois, où elles arrivèrent le 20.

Le 28 au soir, la 2e division avait ses deux brigades s'étendant de la Motte-Patain à Plessis-l'Echelle, son quartier général se trouvant à Roches, et le 30, elle s'établissait entre Maves et Pontijoux ; l'artillerie dans cette dernière localité, pour servir de réserve générale à l'armée. 
Le 2 novembre, le général Pourcet fut remplacé à la tête du 16e corps par le général Chanzy. 
Le 8, l'armée commença son mouvement sur Orléans. 
La 2e division partit de Pontijoux à 5 heures du matin, se dirigea sur la Madeleine-Bourichard, Plessis-l'Echelle, la route du Comte, le Moulin des Boëches, la ferme de la Villette et vint s'établir, sa 1re brigade entre Bizy et le château de Coudray, sa 2e brigade en réserve à hauteur du château de Mézières. 

Bataille de Coulmiers (9 novembre). — Le 9, la 1re brigade de la 2e division devait marcher par Chambdry et Villorceau sur Coulmiers, qu'elle devait enlever en tournant le grand Lus, attaqué par des troupes du 15e corps ; elle avait avec elle les 5e et 6e batteries et la section des mitrailleuses. 
La 2e brigade devait suivre le mouvement à une distance de 2 kilomètres avec la 3e batterie de la division et une batterie de 12 tirée de la réserve. 
Vers 9 heures et demie, le canon se fit entendre sur la droite; c'était le 15e corps qui attaquait Baccon. 
Bientôt les tirailleurs de la 2e division eurent à subir le tir de deux batteries prussiennes placées sur ce point et qui les prenaient d'écharpe.
Les 5e et 6e batteries se portèrent alors en avant pour répondre à cette canonnade et l'infanterie attendit que les batteries prussiennes fussent réduites au silence pour continuer son mouvement.

La 2e division arriva en ligne vers midi, son artillerie, placée en avant de Saintry, commença à tirer sur Coulmiers. Vers 3 heures, notre artillerie ayant forcé celle des Allemands à ralentir son feu, la 2e division attaqua Coulmiers. A 4 heures, ce village était à nous, et 3 de nos batteries, parmi lesquelles les 5e et 6e furent placées sur le côté qui fait face à Rosières et à Gémigny, qui tenaient encore, afin de rendre impossible tout retour offensif de l'ennemi. La 5e batterie eut 2 hommes et 2 chevaux blessés par des balles ; la 6e batterie n'eut aucune perte. 
Dans la nuit du 9 au 10, la 1re brigade de la 2e division occupa Ormeteau et la 2e brigade Epieds. Le 10, vers midi, on se mit en marche sur Orléans."

De Noüe, qui avait été promu Lieutenant-Colonel en date du 21 Octobre, s'illustrera particulièrement durant la bataille (in "Gaulois et Germains-récits militaires", de Joachim Ambert, 1885) :
"J'ai aussi un autre souvenir précieux de la bataille de Coulmiers. Deux ou trois fois par heure, nos batteries cessaient un instant leur feu et se portaient rapidement plus près de Coulmiers. 
En passant près d'une de ces batteries qui recommençait son tir, je remarquai que les boulets et les obus pleuvaient sur nos pièces qui répondaient furieusement. Les canonniers et les chevaux tombaient de tous côtés. 
Je fus saisi d'admiration en voyant le colonel d'artillerie de Noue auprès d'une ferme abandonnée ; sa lorgnette à la main, quelques fourriers autour de lui, le colonel, calme, tranquille comme dans un salon, envoyait partout ses ordres, commandant sans la moindre émotion, suspendant un mouvement, dirigeant le feu ou pressant la marche en avant. 
J’ai vu ce jour là, 9 novembre 1870, des actes de bravoure exrtraordinaires, mais l’image de ce colonel est restée dans mon souvenir comme le suprême effort de l’homme sur la nature, comme la victoire la plus complète d'un cœur de soldat remplissant son devoir."

La campagne de l'Armée de la Loire allait subir quelques revers (in "Historique du 12e Régiment d'artillerie 1834-1890") :
"La 2e division occupa, avec sa lre brigade, tout le terrain compris entre la ferme de Nuisement et la Haute-Épine, et avec sa 2e brigade, Gémigny, Rosières et Coulmiers. Dans ces positions, des retranchements furent élevés pour abriter les batteries. Le 18, le quartier général de la 2e division fut porté à Gémigny. Les 3 batteries de la division et de la section de mitrailleuses occupèrent ce village. 
Le 1er décembre, le 16e corps se porta en avant, la 2e division n'arriva qu'à la fin de la journée aux positions qui lui avaient été assignées, et ne fut pas en gagée au combat de Villepion. Sa 1ere brigade s'établit à Muzelles, sa 2e brigade, avec les 5e et 6e batteries, à Terminiers.

Bataille de Loigny (2 décembre). — La 2e division portant sa 1ere brigade sur la route de Terminiers à Gommiers, marcha le 2 sur Loigny, qu'elle enleva sans coup férir, puis se porta sur la ferme de Beauvilliers et le château de Goury. 
Mais cette attaque était trop précipitée et n'avait pas été suffisamment préparée par l'artillerie. Les Prussiens, après un premier moment de surprise, se reformèrent, attaquèrent la 2e division déjà maîtresse du château de Goury et la forcèrent à se replier sur Loigny. Malgré le secours apporté par les autres troupes du 16e corps, la 2e division continua sa retraite et vers 12 heures et demie, elle arrivait à hauteur du château de Villepion. 
Vers 3 heures, quelques troupes de la 2e division furent reportées en avant sur la crête de Terre-Noire, battue par les batteries ennemies de Lumeau et de Goury. Mais tout le 16e corps dut bientôt cesser la lutte. 
Les 5e et 6e batteries eurent beaucoup à souffrir du tir des batteries prussiennes. La 5e batterie perdit 39 chevaux et ne put emmener que 5 pièces et 3 caissons. Dès que la batterie fut mise à l'abri, un attelage alla chercher la 6e pièce et fut assez heureux pour la ramener. 
Le soir, lorsque le 17e corps arriva sur le terrain et prit vigoureusement l'offensive, la 5e batterie se joignit à l'artillerie de réserve de ce corps, et marcha de nouveau en avant, dans la direction de Loigny. A la nuit, toute la ligne battit en retraite sous une grêle de balles.
Dans cette retraite, le capitaine commandant eut son cheval tué sous lui.
Pendant la nuit du 2 au 3, la 2e division occupa Gommiers, et les 5e et 6e batteries, Terminiers, qu'elles avaient quitté le matin.

Canonnade de l'Encornes (3 décembre). — Le 3, l'armée battit en retraite sur les positions en avant d'Orléans. La 2e division devait s'établir entre Coinces, Boulay et Janvry, occupant fortement Bricy. Pendant son mouvement, elle reçut l'ordre de se porter sur l'Encornes et Huêtre, au secours du 15e corps. Arrivé à hauteur de l'Encornes, le général Barry engagea un combat d'artillerie, qui arrêta la marche de l'ennemi jusqu'à la nuit.
La 2e division s'établit ensuite dans les positions du Huêtre et de Bricy, les 5e et 6e batteries dans ce dernier village.

Combats de Bricy et de Boulay (4 décembre). — La 2e division, attaquée par des masses considérables, dut céder le terrain et se replier sur Boulay. Lorsque cette position se trouva menacée d'être tournée, la 2e division se mit en retraite dans le plus grand désordre. Une partie des troupes, parmi lesquelles les 5e et 6e batteries, se dirigea sur Mer avec le général Barry.
Les batteries sont tout à fait hors de service, n'ayant plus qu'un très petit nombre de servants et de conducteurs, écrit le général Barry à la date du 5 décembre.
En effet, depuis le 2 décembre, la 5e batterie était réduite à 3 servants par pièce et tous les cadres étaient à pied ; la 6e batterie était encore plus éprouvée.

A Bricy, le capitaine commandant de la 5e batterie avait eu son deuxième cheval tué sous lui, et à Boulay, 2 caissons de cette batterie avaient sauté. Le sous-lieutenant Lachaume, qui commandait la 6e batterie depuis le 18 novembre, jour du départ du capitaine Desruol, promu chef d'escadron, avait eu la tête fracassée par un obus dans la journée du 4. Les 5e et 6e batteries quittèrent Mer le 5, pour se rendre à Blois.
Le ministre de la guerre décida, ce jour-là, la formation de 2 armées; la lre, composée des 15e 18e et 20e corps, sous les ordres du général Bourbaki ; la 2e composée des 16e, 17e et 21e corps, sous le commandement du général Chanzy, remplacé au 16e corps par l'amiral Jauréguiberry.
Le 10 décembre, la 5e batterie fut envoyée à Herbault, le 11 à Châteaurenault, et le 12, elle rejoignit à Saint-Amand les troupes du général Barry, qui avait évacué Blois, à l'annonce de l'occupation de Mer par les Allemands. Le 14, la 5e batterie partit pour Ambloy, et le 16, pour Montoire. 
Ce jour-là, le général reçut l'ordre du général en chef de s'établir derrière la Braye, le long de la route de Lavenay à Bessé. Le mouvement s'exécuta le lendemain 17, et la 5e batterie prit ses cantonnements aux Aulnoys.

Le 18, le général Barry se rendit à Jupilles et s'établit de Jupilles à Chahaignes.
La 5e batterie occupa Jupilles ; la 6e batterie occupa Chahaignes.

Le 19, une section de la 5e batterie, sous les ordres du sous-lieutenant Martin, fut détachée auprès des troupes commandées par le colonel Marty. Le 20, les autres divisions de la 2e armée achevèrent de prendre leurs positions autour du Mans.
Là, on organisa deux fortes colonnes mobiles sous les ordres des généraux Rousseau et de Jouffroy d'Abbans. La 5e batterie fit partie de la colonne du général de Jouffroy, qui quitta le Mans le 23 pour se porter sur la Braye, surveiller le Loir et menacer Vendôme. Elle prit part à toutes les marches et contre-marches de cette colonne et, le 31 décembre, elle contribua à la prise du château de Bel-Air, en avant de Vendôme.

L'effectif de la 6e batterie avait été tellement réduit, qu'il fut décidé que cette batterie serait dissoute et que les éléments qui lui restaient, seraient versés dans les deux autres batteries de la division, 5e du 12e et 19e du 9e pour les reconstituer. Cette opération eut lieu le 28 décembre. La 5e batterie participa, avec le reste de la 2e armée, à la retraite sur Laval. La défense de Laval fut confiée au 16e corps.
La 5e batterie resta deux jours en position au-dessus de la ville, mais sans tirer un coup de canon, l'ennemi ne s'était pas présenté.
Le 28 janvier, à la signature de l'armistice, la 5e batterie fut cantonnée à Saint-Barthélémy sur la route de Laval à Rennes.
Le 11 février, la 2e division quitta Laval pour se rendre à Châtellerault, avec mission de courir le pays entre Châtellerault et Le Blanc. Elle se trouvait à Châtellerault lorsque les préliminaires de la paix furent signés.
Le 7 mars, le Gouvernement décida que la 2e armée serait licenciée."

On en apprend un peu plus sur de Noüe via une de ses lettres, publiée dans "La défense de Besançon - journal d'une ambulancière, 1870-1871" (par Isabelle Febvay, 1912) :
"La lettre suivante du colonel d'artillerie de Noue m'arrive après onze jours de voyage. Je la transcris in extenso. 
« Armée de la Loire, 16e corps d'armée. 
«Etat-major de l'artillerie. 
« Le Mans, 5 janvier 1871. 
« Chère madame, 
« Avez-vous jamais reçu la lettre que je vous ai adressée (…) pour vous remercier de la vôtre ? J’en doute. Car nous touchions à cette période agitée qui a bouleversé tous les services, et je n’ai pas eu de nouvelles des lettres que j'ai écrites à ce dernier moment. Vous devez bien deviner, n'est-ce pas ? que le souvenir d'une femme amie est un rayon de soleil dans le ciel nuageux d'un homme qui guerroie. 
« Je tiens cependant à ce que vous sachiez que j'ai été assez poli pour vous répondre. Et j'espère que vous me jugez assez appréciateur des bonnes choses pour avoir dégusté à petites gorgées le plaisir que vous m'avez fait. Cependant je n’ai jamais reçu de vous que cette lettre, arrivée dans les derniers jours de novembre, et je ne sache pas que ma femme ait été plus heureuse que moi Lorsque je vous ai répondu, nos bottes étaient graissées et j’étais tout prêt à monter à baudet… hélas ! Nous avions l’espoir d’obtenir un résultat plus satisfaisant, et nous pensions bien un peu qu'il nous serait donné de toucher aux portes de Paris. 
« Mais n'allez pas croire pour cela que nous ayons toujours été battus à plate couture. Le plus souvent nous avons maintenu nos positions dans ces combats journaliers qui ont marqué les dix premiers jours de décembre. Plusieurs fois même nous avons conquis des positions, et si finalement nous avons reculé, c’est que nous ne devions pas nous laisser couper de Vendôme d'abord et du Mans ensuite. 
« Voilà l'histoire vraie de mes luttes de décembre. Soyez certaine que nous avons tué plus de Prussiens qu'ils ne nous ont tué de monde, et que leur nouvel appel de landsturm en est la conséquence. J'espère que cette assurance fera palpiter d'aise votre cœur de bonne Française, au même degré que je palpite moi-même. 
« J'ai des nouvelles fort irrégulières de Mme de Noue; elle et mes enfants sont à Dusseldorf auprès de mon frère, fait prisonnier à Metz. 
«  Mes parents sont enfermés à Paris ; les premiers ballons m'en apportaient régulièrement des nouvelles; mais voilà longtemps que je suis privé de ce bonheur. 
« Quant à votre serviteur, vous aurez sans doute appris par les journaux son heureuse étoile.
Veuillez, je vous prie, chère madame, agréer mes hommages, ainsi que madame votre mère, et transmettre toutes mes amitiés à votre mari.
« Votre très dévoué serviteur, 
« L. DE NOUE."


Après la guerre.
On apprendra le 23 Avril 1873 (The Times) que de Noüe est nommé Attaché Militaire à l'Ambassade de France à Washington.

L'année suivante, on le retrouve à Nantes, Lieutenant-Colonel au 35e Régiment d'Artillerie.
De Noüe en prendra la tête à sa promotion au grade de Colonel, le 8 Octobre 1875.
Le régiment partira ensuite sur Vannes.

De Noüe est promu Général de Brigade le 22 Août 1882.
Il commande alors l'artillerie du 10e Corps d'Armée, à Rennes.

Il est fait Commandeur de la Légion d'Honneur le 5 Octobre 1886, et admis dans la 2e Section (réserve) le 9 Décembre suivant.
Il décède le 2 Juillet 1887 en son Château du Lys (Seine-et-Marne).