Il part avec son régiment pour l'Orient et
la Guerre de Crimée le 27 Avril 1854.
Quatre escadrons du 1er Chasseurs d’Afrique, sous les ordres du
colonel de Ferrabouc, quittent Alger du 5 avril au 3 mai, sur 34 navires
de commerce et 3 frégates de la marine impériale.
Au 22 mai les quatre escadrons du 1er chasseurs d’Afrique étaient
réunis à Gallipoli, et le 12 juin ils partaient pour Andrinople où
ils séjournaient jusqu’au 24 du même mois.
Le 25, le régiment se mit en route pour Varna, qu’il atteignit le 4
juillet, après avoir franchi les Balkans.
Le régiment est alors embrigadé avec le 4e de l'arme sous le
commandement du général d'Allonville.
Cette campagne Bulgare sera marquée par la double frustration de
l'absence des Russes et la triste présence du choléra.
La maladie fera toutefois peu de victimes dans les rangs du 1er
Chasseurs d'Afrique.
Le 22 Août, le 1er Escadron du Régiment
s'embarquera pour la Crimée où les alliés débarquent. Il est
présent à la bataille de l'Alma, où il n'est pas engagé mais fait un
service d'estafette très exposé.
Le 4 Octobre, les 3 autres Escadrons du régiment embarquèrent pour
rejoindre leur premier Escadron en Crimée, au sein de la Division
Bosquet. Il fait le service d'escorte du Général.
Le 25 Octobre, le Régiment est présent à la
Bataille de Balaklava, où sa présence, en soutien du 4e Chasseurs
d'Afrique qui charge les batteries Russes, forcent ceux-ci à la
retraite et permet de sauver les restes de la malheureuse Brigade
Légère de Cardigan :
"Le 1er de chasseurs d’Afrique reçut l’ordre de dégager la
cavalerie anglaise et le régiment montra qu’il se tenait aussi bien
dans une bataille rangée que dans la guerre d’escarmouche qu’il
faisait en Afrique et que le feu meurtrier des canons russes ne l’arrêtait
pas plus que la fusillade des Arabes. A la vue de nos escadrons, l’artillerie
russe avait rattelé ses pièces et battu en retraite.
Au moment où le régiment se ralliait, un obus vint éclater au-dessus
de notre étendard, qui voyait le feu pour la première fois ; un instant,
l’aigle d’or disparut dans un petit nuage de fumée blanche, puis
tout se dissipa et il reparut plus brillant que jamais. Notre étendard
avait reçu le baptême du feu."
Le siège de Sébastopol avait commencé, qui
ne procurera guère d'occasions de se distinguer à la cavalerie
Française, astreinte à un service de Grand'Garde, hormis quelques
escarmouches avec les Russes.
Le 1er Chasseurs d'Afrique campe avec le 4e de l'arme et le 6e Dragons "dans
une fourche, formée à trois kilomètres environ de Sébastopol, à
huit kilomètres de Kamiesh, par le ravin dit des Anglais. L'espace
compris entre les deux branches reçut le nom de Camp supérieur. L'une
d'elles nous séparait du quartier général et du premier corps
d'armée commandé par le général Forey ; l'autre, de l'armée
anglaise employée au siège et du deuxième corps aux ordres du
général Bosquet."
Fin Décembre, le régiment sera engagé contre
les Russes lors d'une reconnaissance sur la vallée de Baïdar :
"Reconnaissance de la vallée de Baïdar, le 30 décembre : le
Général Morris avec les 1er et 4e Chasseurs d'Afrique et le 6e
Dragons, accompagnés de 6 bataillons, se porte du col de Balaklava sur
la vallée du Baïdar en vue de tâter les Russes. La colonne est
bientôt en face de 3 « sotnias » (escadrons) de Cosaques ; deux
escadrons de Chasseurs d'Afrique les chargent, tandis que l'infanterie
est aux prises avec 6 000 Russes. L'ennemi se replie et le Général
Morris a le loisir d'observer toute la vallée du Baïdar. Il se retire
en fin de journée."
Le
29 Janvier 1855, au cours du rigoureux hiver Criméen,
Talleyrand-Périgord est sans doute réchauffé par sa promotion au
grade de Capitaine en Second.
Le 24 Mai, le régiment participe, au sein de
la Cavalerie Française, à la reconnaissance de Traktir :
"Le 25 mai 1855, le 1er de chasseurs d’Afrique fut chargé de
traverser la Tchernaïa au pont de Tractir, et de s’emparer d’une
redoute établie par les Russes sur la rive opposée du fleuve. Le
colonel de Ferrabouc partit à la tête de son régiment, franchit le
pont sous une pluie de feu, et chassant devant lui l’artillerie et l’infanterie
ennemie, occupa la redoute, presque sans résistance de la part de ses
défenseurs."
Le 16 Août, le régiment est présent à la bataille de la
Tchernaïa - où les Chasseurs d'Afrique forment l'aile gauche.
le 8 Septembre, on relève que
Talleyrand-Périgord compte à l'Etat-Major Général dans le rôle de
"Commissaire près de l'armée sarde".
Le 9 Septembre, Sébastopol est prise, et la paix sera signée le 30
Mars 1856.
Talleyrand-Périgord sera fait Chevalier de la Légion d'Honneur
le 16 Avril suivant.
Le 1er Chasseurs d'Afrique sera de retour à Alger le 20 Juin 1856 -
sans Talleyrand-Périgord qui rejoint le nouveau régiment des Chasseurs
à Cheval de la Garde Impériale le
10 Mai 1856.
Il est de retour en France le 8 Septembre 1856.
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Il y prend les fonctions d'Adjudant-Major
le 9 Mai 1857.
Il participe avec son régiment à la Campagne d'Italie.
Il est décoré le 12 Juin 1860 de l'Ordre des Saints Maurice et
Lazare.
Il passe Capitaine Commandant un Escadron le 13 Novembre 1862.
Il est promu Chef d'Escadrons le 13
Août 1865. D'abord affecté au 5e Cuirassiers, il permute très
vite, le 26 du même mois, pour le 2e Chasseurs, et ce même jour
pour le 4e Hussards - qui fait alors partie de l'armée d'occupation à Rome.
Adalbert de
Talleyrand-Périgord y sera posté du 21 Septembre 1865 au 16 Décembre
1866.
Il est fait Commandeur de l'Ordre Pontifical de Saint-Grégoire
le 26 Mars 1867.
Il épousera le 10
mars 1868 Marguerite-Françoise-Charlotte Yvelin de Biéville (née le
28 Août 1840) :
"10 mars. -M. Louis-Alexis-Adalbert, baron de
Talleyrand-Périgord, chef d'escadron au 4e chasseurs (sic), fils d'Alexandre-Daniel,
baron de Talleyrand-Périgord, et d'Elisa-Alix Sara, sa veuve, avec Mlle
Marguerite-Françoise-Charlotte Yvelin de Bieville, fille de
Louis-Gaspard-Adolphe Yvelain, baron de Biéville, général de
division, aide de camp de l'Empereur, G.O. Légion d'Honneur, et de
Jeanne-Marie Tiollier, à Paris."
(in "Annuaire de la Noblesse Française 1869")
Adalbert de Talleyrand-Périgord est fait
Officier de la Légion d'Honneur... le lendemain, 11 Mars 1868.
Joli
cadeau de mariage !
Notre officier bénéficie en effet d'appuis
...bien placés !
Ainsi le Maréchal Bazaine lui-même écrit-il le 17 Août (année
indéterminée, 1867 ou 1868) à un Général (probablement Inspecteur,
non identifié) :
"Mon cher Général,
Je vous félicite de tout cœur sur votre promotion dans la Légion
d'Honneur.
Avez vous reçu ma lettre concernant M. de Talleyrand du 4e Hussards ?
Que pouvez-vous faire pour lui à cette inspection ? Ayez la bonté de
me le dire, afin de me mettre à même de répondre aux personnes qui
m'ont écrit pour lui.
Je vous donne ma poignée de main, et croyez à mes sentiments
affectueux,
Mal Bazaine"
(in Autographensammlung
"Dr. Georg Heberlein",
Bibliothèque de Guisanplaz)
Talleyrand est promu Lieutenant-colonel
au 7ème Hussards le 05
août 1869.
Il était père d'une petite Charlotte-Louise-Marie-Thérèse depuis le
4 Juin.
Il participe à la guerre de 1870 - subira le
sort de l'Armée de Metz et partira en captivité en Allemagne, où on
le croise sous la plume de Henri Choppin, dans son
"Journal de
captivité d'un officier de l'armée du Rhin (27 octobre 1870-18 mars
1871)" :
"Beaucoup d'anecdotes viennent sous ma plume pour compléter le
tableau de la désolation de ce camp de toutes les misères. Je n'ai pas
le courage de l'entreprendre et, en attendant des temps meilleurs, me
plonge dans les Rêveries du maréchal de Saxe, que le
lieutenant-colonel du 7e de hussards, M. de Talleyrand- Périgord, a eu
l'amabilité de me prêter."
l'Historique du 7e Hussards nous précise :
"Le lieutenant-colonel de Talleyrand, rentré de captivité,
prit le commandement du dépôt à la date du 26 mars (1871). Il le conservera
jusqu'au 12 avril, jour de la rentrée du colonel Chaussée".
Il figure à l'Etat-Major du régiment reconstitué à Castres en
mai 1871, sur la
base du Dépôt du 7e Hussards, du 3e Hussards de Marche, et des hommes
et cadres rentrés de captivité.
Le Figaro publiera dans son édition du
samedi 9 Novembre 1872 :
"Le colonel de Talleyrand-Périgord est mort
subitement avant-hier.
Il laisse une veuve, fille du général baron de Biéville, ancien aide
de camp de l'empereur, chef de son cabinet militaire."
Sa veuve mettra au monde une
petite Charlotte-Louise-Marie-Adalberte le 13 Février suivant.
L'aînée des deux filles, Marie-Thérèse,
épousera le 31 Juillet 1892 Armand de Villeneuve-Guibert, Lieutenant au
2e Hussards.
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Laissons la conclusion à Henri Choppin, qui
dresse un portrait de notre homme, lors de son passage aux Chasseurs de
la Garde, dans ses "Souvenirs d'un Capitaine de Cavalerie
(1851-1881)" :
"Lorsqu'on quitte le pont des
Moulins et qu'au lieu de s'engager sur la place du Marché, on tourne à
gauche, on est sur le quai Bellevue. C'est là que se dresse l'immeuble
en question.
Les hôtes étaient, par rang d'ancienneté, M. le comte Adalbert de
Talleyrand-Périgord, capitaine adjudant-major, qui venait du 1er
des chasseurs d’Afrique, où il avait débuté dans la carrière comme
engagé volontaire. Il apportait dans ses fonctions une largesse de
vues, qui jurait singulièrement avec la manière de servir de ses deux
autres collègues, peu disposés à l’indulgence quand ils avaient à
sévir pour une infraction quelconque aux articles sacrés du service
intérieur. Comme il avait fait beaucoup de campagnes, il pouvait mettre
à profit son expérience pour donner des conseils aux jeunes et ne se
montrait pas assez barbare pour refuser, aux sous-officiers, une
permission de la nuit, qu’ils n’avaient pas demandée au rapport
pour une raison quelconque. Il savait qu’il avait affaire à des
astrologues, qui ne prendraient pas des airs subjugués au point de se
laisser choir dans un puits au cours de leurs études sur le mouvement
des étoiles.
Je l'ai retrouvé lieutenant-colonel du 7e de hussards à Metz, puis en
captivité à Hambourg. Chaque jour, nous faisions de longues promenades
sur les bords de l'Alster, détournant, autant que possible, les yeux
des monuments où flottaient les drapeaux annonçant de nouvelles
défaites pour nos armes. On cherchait, dans le passé , un
adoucissement aux angoisses du présent. Il avait épousé la fille du
général de Biéville, aide de camp de l’Empereur. Il est mort assez
à temps pour ne pas assister à celte agonie de la France, dont a
parlé Renan. C'était l'officier distingué et l'honnête homme dans
toute l'acception du mot."
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